Le grand déménagement

De chaque côté de la route, tous deux regardent le défilé de dos cambrés, d’épaules tordues, de cous pliés. Une immense chaîne humaine qui trace sur les chemins boueux les premières empreintes des réfugiés du développement.

Nous sommes dans une des nombreuses villes en Chine qui ont été rayées de la carte par la construction des immenses barrages, les plus grands du monde. Les uns se dépêchent, les autres veulent rester jusqu’au bout pour voir ça. Les chevaux ne comprennent pas pourquoi on les dirige vers la plaine. Les ossements des ancêtres sont déterrés. Dans les chemins boueux s’impriment les premiers pas des réfugiés du développement. 

Les voix qu’on entend crier tout au long de la scène sont enregistrées en mandarin et cantonnais. Voici ce qu’on entend 

« Pousse ! Pousse ! Avance encore … là.. .stop !  
Dépêchez-vous ils vont faire tomber l’immeuble, la rue sera bloquée.
Non, on ne peut plus passer par là
Venez Grand-Père,  on a gardé une place pour vous ici. Oui, votre femme y est déjà. Ne vous inquiétez pas, vous allez la rejoindre.
Non ! Fini, plus de place ! Laisse les meubles, là où on va ce sera trop petit pour les rentrer. »

02’27. « Tu sais à quoi ça ressemble, cette nouvelle ville ?
– Je sais pas mais pour la pension j’irais jusqu’en Russie. »

02’18. La voix des Anciens annonce les désastres écologiques à venir. Ils disent :
« Un jour le fleuve se mettra en colère, et les eaux portées par le vent frapperont plus fort que les pierres. »

 

Voici à quoi ressemble la création des bruits de pas dans la boue

Merci à Ziyue Zhang et Angela An pour les voix.